Era ? Sais-tu ce qu'est être calme ? Connais-tu ce sentiment de plénitude quand tu t'allonges dans l'herbe et tu ne fais rien d'autre à part profiter et regarder le ciel ? Sais-tu ce que cela fait d'être assise et de juste écouter, de ne faire qu'une chose à la fois au lieu de toujours paniquer ? As-tu seulement réaliser à quel point tu perdais ton temps à vouloir toujours faire tout bien trop vite ? Tu ne réfléchis jamais, tu fais tout ce qui te passe par la tête sans jamais réaliser que chacun de tes gestes est inutile. Era, tu ne sais pas te poser, et je n'ai jamais aimé ça de toi. J'aurais aimé que tu sois plus là et moins ailleurs, que ta tête soit plus sur Pyrrhee que dans les airs. Mais toi tu rêvais de grandeurs, tu ne voyais pas les choses comme les autres les voyaient.

Enfermée dans ta belle tour, tu t'agitais. Comme un lion en cage tu t'ennuyais. Tu avais déjà fais mille choses mais ce n'était pas assez. Tu voulais refaire le monde, faire des plans qui changeraient tout. Tu avais de l'ambition, et de la conviction. Tu savais que ce que tu ferais serait juste parce que tu n'as jamais pensé à toi, les autres te préoccupaient bien trop. Tu voulais le bonheur de tout le monde, n'ayant jamais eu le temps de réfléchir au tiens. De toute façon, tu ne réfléchissais pas. Des feuilles étaient cachées partout. Des rêves d'évasions, de prise de pouvoir. C'était contre ton père, mais tu t'en fichais. Bien que tu l'aimais, tu n'étais pas d'accord avec lui.

La seule noirceur que tu aies jamais été capable de voir fut celle de ton père. Tu ne voyais que le bon dans les gens, tu ne voyais que les qualités. Je ne sais pas si c'était par bonté ou par naïveté, mais tu faisais toujours confiance aux gens, te disant que s'ils te trahissaient, ils finiraient par le regretter. Tu t'es fais abuser tant de fois que je me demande encore comment tu as fais pour ne pas craquer. Mais tu disais juste qu'un jour, la chance tournerait, qu'ils finiront par payer. Et tu avais tellement confiance en toi que j'ai finis par y croire.

Mais il y a quelque chose que les gens n'ont jamais vu dans tes yeux : ta cruauté. Parce que sous tes airs doux, tu n'as pas peur de blesser. Tu sais encaisser autant qu'attaquer, ne craignant pas les répercussions que cela pourrait avoir sur toi. Cruelle, et insensible. Tu es capable de faire les pires choses sans te rendre compte que ce que tu fais n'est pas acceptable. Tu n'as pas froid aux yeux, et c'est bien ça le problème. Autant dans le bien que dans le mal, tu ne connais que l'excès.

Tu cours. Je te vois, du haut de ma tour. Tu cours sans même regarder où tu te diriges. Tu cours juste, le plus loin possible du château. Si vite que je finirais presque par te perdre des yeux. Mais je te vois, tu es là, passant par dessus toutes les murailles et les portes en direction des bas quartiers où tu te sauras cachée. Sous ta forme féline, tu es bien plus rapide. Tu as l'air si magique qu'on pourrait presque penser que tu laisses une traînée de poudre pailleté derrière chacun de tes pas. Pourquoi as-tu fui ? Aurais-tu pris peur ?

Ah mais oui. Tu es un félin. Tu ne t'en serais jamais douté, c'est ça ? Tu n'aurais jamais pensé découvrir un jour que tu étais une de ces créatures que ton père haïssait tant. Et ton père, toi, tu l'aimais plus que tout. Alors tu n'as pas eu le choix, c'est ça ? Pour ne pas qu'il le découvre, tu as du fuir, loin, cette nuit. Toi, la princesse, tu as renoncé à ta vie de luxe pour plonger dans celle des plus pauvres, ne te doutant pas de toute les difficultés que tu auras à affronter. Mais ne t'inquiète pas, moi, je serais là pour t'aider...